Le billet du mois
Novembre
Mort au passé
par Jacques Sylvestre, o.p.
Deux façons d’aborder la question de notre mort. La dissimuler, se dérober à sa présence par des fuites, à la manière des sociétés matérialisées. Ou bien apprendre dès le plus jeune âge à se résigner et l’accepter, comme le font les sociétés encore spiritualisées.
Dans notre environnement d’Occidentaux, non seulement les thanatologues (croque-morts) ont tout mis en œuvre pour défigurer la mort en transfigurant celui qui repose là, exposé une dernière fois à notre vénération; mais il y a encore ceux et celles qui souhaitent vivement ne pas avoir conscience de sa présence et comme on dit, passer de vie à trépas subitement, sur la route, dans le sommeil, à pied levé, quoi! Sans prévoir, sans souffrir. Enfin d’autres sont à ce point harcelés par la peur de mourir ou de souffrir avant de mourir, qu’ils veulent en hâter l’échéance par une assistance qui réalisera «la mort douce».
La mort au passé : hier, pour ne pas écrire autrefois, la mort constituait le passage de cette vie à l’autre vie. D’aucun ont tenté de traduire ce passage par une sorte de réincarnation. Le passage d’une incarnation à une autre. Qui peut vraiment et sciemment désirer se réincarner dans une autre existence mortelle? La seconde sera-t-elle plus agréable que la première? Pourrons-nous seulement choisir dans quelle autre vie nous pourrons recommencer? «Qui choisit prend pire», enseignait le sage.
Laissons-nous donc interpeller par ce magnifique chant des Laudes. Il ne peut que nous questionner en profondeur et nous situer comme des êtres voués à l’immortalité :
Le Seigneur passe
Ouvriras-tu quand frappe l’inconnu?
Peux-tu laisser mourir la voix
Qui réclame ta foi?
Le Seigneur passe.
Entendras-tu l’Esprit de Jésus-Christ
Il creuse en toi la pauvreté
Pour t’apprendre à prier.
Le Seigneur passe
Éteindras-tu l’amour qui purifie?
Veux-tu le fuir et refuser
D’être l’or au creuset?
Le Seigneur passe
Entreras-tu dans son Eucharistie?
Rappelles-toi que dans son corps
Il accueille ta mort. (Texte CFC)